Ses portraits de Miossec, Stivell, Daho… entrent au musée de Bretagne. Richard Dumas, photographe rennais de renom, est un passionné de musique.
Alan Stivell est l’un des portraits de Richard Dumas acheté par le musée de Bretagne, à Rennes. | RICHARD DUMAS
La photo de Christophe Miossec pour la pochette de son premier album Boire , Richard Dumas l’a prise en dix minutes : « On n’avait pas dormi cette nuit-là, au bar-hôtel du Vauban. Je l’ai placé près de la fenêtre, la lumière douce du ciel gris brestois sur son visage, tout était là. Comme le disait Picasso, il a fallu dix minutes et une vie pour la faire. »
Le musée de Bretagne vient d'acquérir cinq portraits réalisés par le photographe Richard Dumas, dont la fameuse photo de l'album « Boire » de Miossec. | RICHARD DUMAS
Le photographe entre au musée de Bretagne, à Rennes, grâce à cinq portraits de musiciens bretons. Pour les réaliser il aura fallu en effet une vie, avec la passion de la musique chevillée au corps.
Né en 1961, Richard Dumas grandit en écoutant les crooners à la Sinatra ou Elvis Presley. « Mes parents ont quantité de films en super 8 où je danse devant leur radio pick-up », s’amuse le photographe.
Le cinéma est son autre passion, dans les pas de son grand frère, qui l’y emmène deux fois par semaine. Il est marqué par les impressionnistes allemands comme Fritz Lang, goût qu’il partage avec un certain Philippe Pascal.
Regarder les groupes
Il n’a pas vingt ans quand Rennes se met à vibrer pour le rock et que naissent les TransMusicales. Richard est à la guitare avec les Sax Pustuls. Mais lorsque le chanteur Philippe Pascal lui demande de rejoindre son groupe Marquis de Sade, « j’ai dit non ! Je me suis rendu compte que j’avais plus de plaisir à regarder les groupes qu’à être sur scène ».
Il reste ami avec un certain disquaire nommé Étienne Daho, qui monte à Paris avec les maquettes de ce qui deviendra son premier album, Mythomane. « Il a fallu attendre la pochette des Chansons de l’innocence retrouvée, dixième album de Daho, il y a dix ans seulement, pour que je photographie Étienne. On se connaissait trop bien. »
C’est bien la musique qui a mené Richard Dumas vers la photo et non l’inverse. Au départ, doctorat en poche, il se destinait à la robotique. Mais les photos de ses amis musiciens sont rapidement repérées par la presse.
Il devient un collaborateur régulier de Libération, Télérama, Les Inrockuptibles et même Ouest-France, où il a d’ailleurs collaboré avec… Christophe Miossec.
« Avec la presse, je n’ai parfois que quelques minutes pour faire une photo. J’aime ces conditions extrêmes bien plus que la photo de studio. Ensuite, c’est ce que je fais avec le négatif qui m’intéresse. »
Après son portrait de Miossec, il devient le portraitiste favori des maisons de disques. Son talent et son Rolleiflex le mènent de Los Angeles à Tokyo, du rockeur Keith Richards disparaissant derrière la fumée à l’écrivain Murakami.
Daho, Marquis de Sade, Miossec, Kristen Nogues, Alan Stivell : ce sont ces visages en noir et blanc de musiciens bretons qui entrent au musée de Bretagne. « Le domaine de la musique et les portraits de certaines figures très populaires, attachées à la Bretagne, nous permettent de documenter l’évolution sociétale », notamment l’histoire du rock et du celtisme, indique Céline Chanas, directrice du musée de Bretagne.
« Alors Immortel ? » lui textote Miossec. « Pour cela, il faudrait d’abord mourir ! »